Parlez-en sans ambages

21-08-2006 à 00:19:07
Je n'ai vu qu'un seul topic qui abordait la littérature, d'une façon détournée et autour de l'adaptation, et je voulais savoir quel était votre rapport (à tous ici qui construisez et faîtes vivre ce forum) à la littérature, ou à la lecture en général (Bd, comics, mangas...).
Parlez-en sans ambages donc, ceci n'étant qu'une petite tentative pour essayer de vous connaître et aussi pour savoir jusqu'où porte le regard de la cinéphilie contemporaine.

Il m'était venue l'idée, dans une réflexion évasive, que le cinéma était un succédané utile pour pallier notre besoin d'h(H)istoire(s) qui devenait trop compliqué à chercher dans la lecture. Lire un livre devient, semble-t-il, en tous cas autour de moi, un acte héroïque et épuisant de nos jours. Qu'en est-il ici bas ?

PS : le fanatisme ambient pour Stanley Kubrick rend étonnant l'absence de son travail d'adaptation dans le topic qui traitait du sujet.
  • Liens sponsorisés



15-08-2006 à 01:20:06
La littérature au cinéma... Une bonne question, dans la mesure ou ses deux arts se complètent, mais rarement font bon ménage...

Cela reste très évasif, car très différent selon le point de vue littéraire que tu abordes.

Parles t-on d'écrivains reconvertis en cinéastes, ou de livres adaptés au cinéma...??

Deux univers bien distincts je pense, car dans un premier cas, la qualité se révèle assez médiocre.
L'écrivain narrant ses histoires avec beaucoup de facilité, ne s'en sort que très rarement quand il s'agit de les mettre en image.
Ainsi, l'on sépare aisément les deux mondes:

L'écriture d'un côté, et le fait de jongler avec les mots, puis l'image de l'autre, et le fait de jouer avec le fond même de l'écriture...

Deux mondes qui ne font que rarement bon ménage, tant la littérature s'écarte du cinéma, chose beaucoup moins évidente concernant la photographie, ou la peinture, ou là, les intéressés se reconvertissent avec plus de facilité au cinéma... (Kubrick, Kitano ...)

Vient ensuite l'ultime distinction, celle provenant de la littérature adaptée au cinéma, beaucoup plus fréquente et très souvent, fascinante de qualité.
Là encore, bon nombres de cinéastes s'y sont essayé.
Plus de maîtrise, comme quoi l'image et l'écrit peuvent se rencontrer dans un sens - celui du cinéaste qui façonne l'image selon l'écrit - mais très rarement dans l'autre - l'écrivain qui tente de retranscrire l'image de ce qu'il écrit - ...

Ainsi, en conclusion ou en réponse au sujet du topic, la littérature au cinéma se relève perfectible.
Dans un sens, ça fonctionne mieux que dans l'autre...

Le cinéma emprunte à la littérature, la construction d'un scénario, les mécanismes d'écriture, qui offriront ensuite au spectateur, l'image de cet écrit...
Alors que la littérature n'emprunte rien au cinéma... Ni l'écriture, ni l'image, et encore moins le son ou les couleurs...

Nuance considérable, lorsque l'on sait que le septième art regroupe tous les autres arts, et qu'il est le seul à le faire...



15-08-2006 à 09:32:01
Puisqu'il s'agit de parler ici sans ambages, je dois avouer Galimatia, que je ne comprends pas toujours ce que tu dis. Par exemple, ceci :
"PS : le fanatisme ambient pour Stanley Kubrick rend étonnant l'absence de son travail d'adaptation dans le topic qui traitait du sujet".
J'ai de nouveau l'impression de me (nous) faire juger comme chaque fois que je te lis. Surtout ne te vexe pas, car ce n'est absolument pas là que je veux aller. Il s'agissait de parler sans ambages, n'est-il pas ? Il existe des communications difficiles au début qui fonctionnent par après, d'autres très faciles au début, qui foirent au bout de deux semaines. Sans ambages donc, la communication connaît quelques ombrages en ce début entre nos deux âmes... mais rien, je le jure, de bien grave.

Pour revenir à ta question, ma relation avec littérature, je la vis jour et nuit, étant auteur de théâtre. Mais cette vie-là n'a rien à voir avec ma passion pour le cinéma. Parlant de cinéma justement, je hais de plus en plus les mots sauf quand ils font merveille, comme chez Audiard et Blier. Mais c'est tellement rare, cette magie des mots dans le septième art.... Pour moi, le cinéma, c'est le langage de l'image, pas celui des mots. Je peux regarder une scène de 12 minutes chez Leone, sans aucun mot, et prendre mon pied total.

Maintenant, je me souviens du Galimatia Godardien qui risque de ne pas voir les choses de cette façon. Mais moi, les mots chez Godard, c'est ce qui casse tout. Les mots dans le cinéma tue la suggestion narrative. Et moi, ce que j'aime justement par dessous tout, c'est la suggestion. Maintenant, au début de ce forum, il y a eu de gros dégâts sur le même thème "Littérature et cinéma" et je ne tiens pas à recommencer, n'est-ce pas Tlina ? lol


Voilà, ma relation aux mots, que je la vis différemment, qu’il s’agisse de théâtre ou de cinéma. J’aime les mots, les livres, mais au cinéma ce n’est absolument pas ça que je recherche. Dans l’adaptation d’un livre au cinéma, je me fous complètement de la relation qui peut exister entre les deux. Par exemple, «Eraserhead », c’est une adaptation archi-libre de « La métamorphose » de Kafka. Impossible, à la vue du film, de retrouver le roman de Kafka. Voilà pour moi, la meilleure des adaptations possibles…. lorsque le lien entre les deux mondes, image et mot, s’est totalement effondré. Et puis j'adore "Eraserhead", et puis j'adore "La métamorphose". Le lien subsiste dans l'esprit, uniquement dans l'esprit.







15-08-2006 à 10:56:57
J'ai de nouveau l'impression de me (nous) faire juger comme chaque fois que je te lis. Surtout ne te vexe pas, car ce n'est absolument pas là que je veux aller. Il s'agissait de parler sans ambages, n'est-il pas ? Il existe des communications difficiles au début qui fonctionnent par après, d'autres très faciles au début, qui foirent au bout de deux semaines. Sans ambages donc, la communication connaît quelques ombrages en ce début entre nos deux âmes... mais rien, je le jure, de bien grave.


Tu fais bien de le préciser. Je ne voulais juger personne ici mais juste lancer une petite pique sur le Enrico Macias du forum qui partage ses lauriers avec Mr Leone. Comme vous n'aviez pas (à ma connaissance) parlé du travail d'adaptation ou plus simplement de son rapport à la littérature, je me disais que çela pourrait vous inciter à le faire ici. Tout ceci d'une façon positive, pour apprendre certaine choses que je ne sais surement pas. Que tu l'ai pris de travers est peut-être dû à ma piteuse écriture internaute : je ne met aucun smile, aucun ton, enfin rien qui laisse présager que c'était un tant soit peu ironique.

Pour revenir à ta question, ma relation avec littérature, je la vis jour et nuit, étant auteur de théâtre


Est-ce seulement un plaisir ou en fait-tu une activité professionnelle ?

Mais cette vie-là n'a rien à voir avec ma passion pour le cinéma


Schizophrenia ? :) Pourquoi une séparation aussi nette ?

Pour moi, le cinéma, c'est le langage de l'image, pas celui des mots


C'est le langage de l'image Et des sons, qui comprennent les mots, leur oralité. Le mot oral n'a rien à voir avec celui qui est écrit. D'ailleurs le théâtre en est un bon exemple (reprends moi si je m'égare). Il y a un royaume entre le drame lu et le drame seulement écouté, entendu.

Maintenant, je me souviens du Galimatia Godardien qui risque de ne pas voir les choses de cette façon. Mais moi, les mots chez Godard, c'est ce qui casse tout


Je ne suis pas godardien. Je reconnais la filiation parfois peu assumée qu'ont les grands auteurs de la nouvelle vague avec la littérature, mais godard me semble être celui qui y a apporté le plus de réponse cinématographique. Truffaut a un complexe littéraire énorme qu'il pallie parfois très peu. LA voix off des deux anglaises, celle de la nuit américaine, ont une certaine lourdeur narrative.

Voilà pour moi, la meilleure des adaptations possibles…. lorsque le lien entre les deux mondes, image et mot, s’est totalement effondré


Oui, très bien dit. C'est peut-être seulement le terme "adaptation" qui est génant, puisqu'il porte en lui l'attente, la volonté, des retrouvailles avec le livre. Une "image du livre", ce qui est bien sûr négatif, considérant le cinéma comme un pauvre outil de transposition.

Fan de Franz Kafka ?
15-08-2006 à 19:15:32
Est-ce seulement un plaisir ou en fait-tu une activité professionnelle ?


Les deux, j'espère bien. Mais je vais m'arrêter là sur ces détails..


Mais cette vie-là n'a rien à voir avec ma passion pour le cinéma
Schizophrenia ? Pourquoi une séparation aussi nette ?



Schizo, pourquoi pas. Non, je rigole, bien sûr. Mais en ce qui me concerne je passe d'abord par les mots en ce qui concerne le théâtre. Si je travaillais sur un scénarii de cinéma, je travaillerais tout autrement.

Pour moi, le cinéma, c'est le langage de l'image, pas celui des mots

C'est le langage de l'image Et des sons, qui comprennent les mots, leur oralité. Le mot oral n'a rien à voir avec celui qui est écrit. D'ailleurs le théâtre en est un bon exemple (reprends moi si je m'égare). Il y a un royaume entre le drame lu et le drame seulement écouté, entendu.


Oui, rien à dire. Moi, le mot qui me tracasse dans le cinéma, c'est celui qui "explique". Et à 99%, le mot explique dans le cinéma. Je pense en tout cas, que la majorité des "grands cinéastes" a tout fait pour se débarrasser du mot. Et certains cinéastes ont même réussi le tour de passe passe de me rendre le mot sympathique... ROSEBUD !!!!

Fan de Franz Kafka ?






15-08-2006 à 19:43:35
Oui, rien à dire. Moi, le mot qui me tracasse dans le cinéma, c'est celui qui "explique". Et à 99%, le mot explique dans le cinéma.


On est d'accord sur ces fameux mots qui expliquent ou qui débordent malgré eux de leur cadre. Ce genre de mots qui palient à des scénarios médiocres.

Pour les 99 %, tu es très sévère, mais LE cinéma comprend beaucoup de cinémas.

J'ai revu (une anecdote) récemment "jeux interdits" de rené Clément et si le film ne paye pas plus que ça de mine, il y a quelque chose d'incroyable qui se joue entre les paroles des deux enfants et la musique de Narcisso Yepes. Le rythme de celle-ci, régulier et linéaire, entouré d'une harmonie qui laisse de nombreuses plages libres entre les notes aigus, permet aux "mots" des enfants (somme toute extremement banals) de s'intercaler et de créer un tout musical (sonore) incroyablement émouvant. Le mixage sonore y contribue aussi parce que la musique est plutôt mise en avant et se retrouve au même plan que les dialogues. Ceci fonctionne principalement pendant la scène de l'enterement du chien et grâce à la voix aîgue de Brigitte Fossey. Le mot ici change de place, il s'aventure au-delà de son (ses) destinataire(s) et opère sur plusieurs plans d'une façon très musical. C'est très beau et c'est plutôt dénué de complexité.

Cette sensation je l'ai éprouvée durant toute la durée de l"histoire immortelle" de Welles qui est un incroyable tourbillon sonore et visuel. A voir.

Ceci dit cette histoire de mot nous éloigne de la littérature en chaire et en hausse.
A propos de ce que disait acte au sujet des influence, il me semble que le cinéma a tout de même influencé la littérature depuis un peu plus d'un demi siècle. C'est une influence parfois abstraite, peu palbable, mais des gens comme Vian ou les écrivains du nouveau roman ont un rythme incroyablement cinématographique. Ceci dit il y a surement de nombreux exemple (peut-être, certes, pas tous interessant).

Acte, il me semble que tu t'interesse (de près ou de loin) à la littérature asiatique. Je n'y connais strictement rien, aurais-tu quelques conseils ?
20-08-2006 à 23:47:50
La littérature asiatique, oui je m'y intéresse, mais parce que je suis sensible à cette culture, je ne sais que trop te conseiller, tout dépend ce que tu recherches ....


20-08-2006 à 23:53:14
Pas de style particulier mais plutôt, justement, une amarre, un point de départ dans une culture qui m'est foncièrement étrangère. Si tu connais des classiques ou des oeuvres un tant soit peu représentatives, qui concentrent des thèmes propres à l'asie, fais moi signe, j'en suis très curieux.
Je connais Mishima, de nom, et une connaissance m'avais pas mal donné l'envie de lire Le Pavillon d'or. A part ça je brasse dans l'inconnu.
21-08-2006 à 00:07:38
Je te recommande les oeuvres de Ryu Murakami, "Les bébés de la consigne automatique" par exemple, ou "Tokyo Decadence" (le film existe aussi, réalisé par lui même ) qui sont deux oeuvres totalement anarchistes.
Cet écrivain se focalise sur les bas-fonds tokyoïtes, sur l'incommunicabilité des êtres, l'enferment psychique, et laisse place au silence plutôt qu'à la parole.
C'est un auteur intéressant je trouve.

Sinon, Mishima, très bon choix.

Je n'ai pas tout lu, et d'ailleurs je n'ai pas lu le pavillon d'or, en revanche j'ai lu "La musique" et "le lézard noir" qui sont deux très belles oeuvres.

Sinon si tu as apprécié le film "Le tombeau des lucioles " d'Isao Takahata, je te propose de lire le récit qui ainspiré le film.
Il s'appelle "La Tombe des Lucioles" et c'est écrit par Akiyuki Nosaka.
Tu peux trouver le livre en librairie, ou dans l'édition collector du film.
C'est très triste, mais c'est admirablement bien écrit...

21-08-2006 à 00:12:53
C'est noté. Je lirai le Nosaka et les Mishima au plus vite, mes quelques lectures déjà prevues me laissant entrevoir un mois de Septembre complet. D'ici la fin de l'année j'aurai mis un bout de mon esprit à l'est !
21-08-2006 à 00:14:55


Un niakwé de plus sur le forum peut être bien.... Dans quelques années seulement, faudra d'abord me rattrapper loooooooooool
21-08-2006 à 00:19:07
J'aime déjà énormement le cinéma asiatique. D'ailleurs, l'éloignement estival des salles obscures m'a fait manquer le kitano et le pen-ek R. que j'espere voir la semaine prochaine ! Ceci dit j'ai aussi cette tendance à me méfier de la frénésie laudative qui s'opère devant le cinéma oriental. C'est un peu trop pour ne pas être louche.
  • Liens sponsorisés